L’appel des RESTOS du CŒUR

 L’appel des RESTOS du CŒUR, la face visible de l’iceberg.

L’appel des Restos du Cœur a fait beaucoup de bruit, aussi bien dans l’opinion publique que dans la sphère politique. De nombreuses annonces tombent chaque jour et l’absence de cap politique clair sur la situation de la précarité alimentaire installe une concurrence néfaste entre associations dans la quête de dotations privées.solidarité

L’urgence de la situation nous en fait oublier la nécessité de mettre en œuvre une politique publique d’accès à l’alimentation qui ne s’arrête pas seulement à la seule question de l’abri de la faim, mais qui prenne en considération les questions de diversité, de qualité, de choix de l’alimentation, ainsi que de dignité des personnes.

Pour cela, et en attendant de travailler plus en profondeur, l’ UGESS (Union nationale des Groupements des Épiceries Sociales et Solidaires) , a travaillé à la rédaction d’une note de position que nous vous communiquons ci-dessous.

Dans la situation où les projecteurs sont rivés vers les Restos du Cœur, il est nécessaire de faire connaître aussi d’autres formes d’actions de lutte contre la précarité alimentaire, complémentaires à l’action des Restos du Cœur. Sans vouloir concurrencer ces associations, nous devons aussi nous faire notre place et travailler à la promotion de nouvelles formes d’accès à l’alimentation, dont font partie les épiceries sociales et solidaires, telle dans l’Auxerrois « L’Épicerie Solidaire de l’Auxerrois« 

FACE À L’URGENCE : NÉCESSITÉ D’UNE POLITIQUE STRUCTURELLE DE LUTTE CONTRE LA PRÉCARITÉ ALIMENTAIRE
L’annonce du président des Restos du Cœur Patrice Douret a interpellé toute la classe politique et l’opinion publique. Elle a le mérite de mettre en lumière la situation de l’ensemble des associations engagées dans la lutte contre la précarité alimentaire : face à l’inflation sur les produits alimentaires, dans un contexte de hausse du nombre de demandes et de baisse des dons de la grande distribution, le système actuel d’aide alimentaire, basé principalement sur la distribution de produits est à bout de souffle.
Une précarité en forte hausse

Rappelons en effet qu’en avril 2023, l’inflation sur les produits alimentaires atteignait 15 % sur un
an ; celle sur l’énergie 6,8 % (sans compter les fortes hausses en 2021)[1]. Cette inflation impacte bien évidemment les épiceries sociales et solidaires, dont une part importante du budget est destinée à l’achat de denrées. Début 2023, dans une enquête réalisée en interne, 20 % des épiceries adhérentes à l’UGESS faisaient part de difficultés de trésorerie, un nombre similaire a dû refuser d’accueillir de nouvelles personnes, faute de moyens suffisants[2]. Nous avons alerté sur la situation, sans succès.
L’impact est encore plus dévastateur au sein de la population. Dans une enquête du CREDOC, 16 % des personnes interrogées estiment ne pas toujours avoir suffisamment à manger, en hausse de 6 points par rapport à avril 20213. La précarité alimentaire ne touche plus uniquement les personnes
se situant sous le seuil de pauvreté mais désormais toute une partie de la classe moyenne, dont
les revenus se situent entre 1280 et 1840 €. Cela peut s’illustrer par la forte hausse des personnes se situant dans cette catégorie faisant une demande d’ouverture de droits (RSA, CAF…). Il faut souligner que cette catégorie de population ne peut souvent pas bénéficier de l’aide alimentaire à cause de seuils trop restrictifs (35 % des personnes en situation de précarité alimentaire n’ont pas pu bénéficier de l’aide alimentaire pour cette raison).
Une réponse de l’État inadaptée aux besoins des associations : f
ace à la situation, il reste en réaction en proposant encore une fois des financements exceptionnels et en lançant une grande campagne de dons. Cette manière de fonctionner est contre-productive car elle met en compétition les associations qui ont toutes besoin de financements. Surtout, cette urgence tend à se répéter sur des échelles de temps de plus en plus courtes : en 2020, lors de la crise du COVID, en 2022 avec les premiers effets de l’inflation sur le carburant et l’énergie, et désormais 2023. Et ce qu’on va continuer chaque année à répondre dans l’urgence, à une crise durable ?
Afin de répondre à la multitude de défis de précarité alimentaire, ainsi qu’à la diversité des profils
des personnes en situation de précarité, les associations attendent de l’État la coconstruction d’une politique publique de long terme, avec des financements pérennes permettant à nos associations d’évoluer pour répondre aux différents enjeux de lutte contre la précarité alimentaire : celle-ci ne doit pas uniquement se focaliser sur la mise à l’abri de la faim mais prendre en compte les enjeux de qualité, de diversité de l’alimentation et de dignité des personnes.
Nombreux sont celles et ceux qui ne font pas appel à l’aide alimentaire, parce qu’ils se considèrent comme insuffisamment pauvres ou se sentent honteux de franchir le pas1 . Une récente enquête du CREDOC souligne que 35 % des personnes en situation de précarité alimentaire refusent de «bénéficier » de l’aide alimentaire par honte. Cette situation peut s’avérer plus difficile à vivre encore en l’absence de choix des denrées. 71% des recourants bénéficient de colis alimentaires déjà préparés, un renoncement brutal quand l’alimentation représente un plaisir dans notre société.
Les épiceries sociales et solidaires, une des réponses aux défis multiples de la
précarité
Dans ce contexte, les épiceries sociales et solidaires peuvent être une réponse structurelle aux défis de
la précarité alimentaire. En proposant une alimentation choisie et diversifiée, en étant des lieux créateurs de liens sociaux et de vivre-ensemble, elles sont un outil privilégié pour éviter de basculer dans la précarité.
Bien sûr, l’UGESS demande un soutien financier renforcé et pérennisé aux nouvelles formes d’accès à

l’alimentation dont font partie les épiceries sociales et solidaires. Mais plus globalement, elle appelle à
une véritable réflexion au sein du prochain COCOLUPA et dans le cadre de la future Stratégie Nationale Alimentation Nutrition Climat (SNANC) pour la mise en place d’une politique structurelle de lutte contre la précarité alimentaire qui répondent à la diversité des personnes, prenant mieux en compte les enjeux de qualité, de diversité et de choix de l’alimentation et de dignité. Elle doit reposer la question du financement de la solidarité dans notre pays afin de permettre aux associations d’évaluer dans leurs actions, et aux personnes de sortir durablement de la précarité.
Union nationale des Groupements des Épiceries Sociales et Solidaires (UGESS)
41 avenue de la République
69200 Vénissieux

Tel : 06 14 28 33 55
http://ugess.or
1- https://www.insee.fr/fr/statistiques/7618754
2-
https://ugess.org/archives/1687
3-https://www.vie-publique.fr/en-bref/289538-inflation-forte-hausse-de-la-precarite-alimentaire-en-2022

4 – Insee, enquête Aide alimentaire 2021. https://www.insee.fr/fr/statistiques/6466177#onglet-2

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